📖Batouala de René Maran

Introduction
Rien que la note de Senghor peut dĂ©cider un lecteur Ă  lire et aimer le livre de RenĂ© Maran. Le poète Ă©crit Ă  propos de ce romancier que « son style tĂ©moigne d’une rare connaissance de la langue française et de ses ressources. Et pourtant il exprime les qualitĂ©s les plus authentiques de sa race : force simple des images, sens du rythme et des qualitĂ©s sensibles, voire charnelles des mots assemblĂ©s ». L’Ă©tude de ce roman devient dès lors intĂ©ressante, puisque c’est une rĂ©ussite, l’une des premières rĂ©ussites littĂ©raires noires qui fut couronnĂ©e par le prix prestigieux Goncourt en 1921. Le roman expose avec rĂ©alisme la vie des Noirs et pose le problème de la prĂ©sence des Blancs dans un univers qu’ils empestent de leur hypocrisie et de leur mensonge afin de le torpiller Ă  volontĂ© Ă  tous les niveaux, et surtout aux plans Ă©conomiques, culturelles et mĂŞme environnementaux. A travers l’Ă©tude qui va suivre, on s’intĂ©ressera surtout Ă  la vie et aux Ĺ“uvres de l’auteur avant d’aborder le texte en tant que tel.
🎯RĂ©sumĂ© de l’Ĺ“uvre
Il s’agit de l’histoire, dans la brousse africaine, d’un moukoundji (chef de village) nommĂ© Batouala. Il prĂ©pare la fĂŞte des Gan’zas qui doit bientĂ´t arriver et qui marque une Ă©tape dans la vie de chacun puisque les jeunes femmes sont excisĂ©es et les jeunes hommes circoncis. Malheureusement, il ne s’aperçoit pas que sa femme favorite (il en a neuf !) Yassigui’ndja ne l’aime plus et commence Ă  le tromper avec le jeune Bissibi’ngui. Batouala l’apprend finalement le jour de la fĂŞte des Gan’zas et cherche Ă  se venger. La pĂ©riode des chasses arrive et Batouala invite son rival Ă  chasser avec lui. Batouala dans le moment de terreur tente de viser Bissibi’ngui avec une sagaie, mais celui-ci y Ă©chappe de justesse. Mourou (la panthère) tue d’un coup de griffe Batouala, croyant avoir Ă©tĂ© visĂ©e. Il est ensuite ramenĂ© au village. On essaie de le soigner mais on n’y arrive pas. Il agonise pendant trois jours et finit tragiquement sa vie puisqu’il voit devant ses yeux Yassigui’ndja et Bissibi’ngui qui ne se cachent plus.
🎯 Résumé des chapitres de Batouala
✅Chapitre 1 : Le roman commence par le réveil du grand chef de village de Grimari, le moukoundji Batouala. Le narrateur fait une présentation du personnage en insistant sur sa « force légendaire », ses exploits amoureux, guerriers ou de chasseur.
âś…Chapitre 2 : l’arrivĂ©e du jour : c’est l’annonce par message tambourinĂ© (pp. 41-42) de la fĂŞte des Ga’nzas dans les 9 jours Ă  venir aux villages environnants. FĂŞte qui sera marquĂ©e par la circoncision des jeunes hommes et excisions des jeunes filles.
Chapitre 3 : le lendemain de l’annonce, l’une des neuf femmes de Batouala, et sa prĂ©fĂ©rĂ©e, Yassigui’ndja se rend au rendez-vous de Bissibi’ngui. Mais elle surprend le jeune homme avec une autre femme qui se trouve ĂŞtre sa coĂ©pouse I’ndouvoura. Dans sa colère, elle s’en retourne chez elle, mais elle est attaquĂ©e par Mourou la panthère. Elle est sauvĂ©e de justesse par Batouala et Bissibi’ngui.
âś…Chapitre 4 : Trois jours avant la fĂŞte des Ga’nzas, Batouala est invitĂ© par son frère MacoudĂ© Ă  manger. DĂ©vorĂ©es par la jalousie, les deux femmes de Batouala, Yassigui’ndja et I’ndouvoura se querellent.
âś…Chapitre 5 : C’est le jour de la fĂŞte des Ga’nzas Ă  Grimari, et tous les signes d’une belle fĂŞte sont visibles : les li’nghas (tam-tam), les chants des femmes, les rires. Les villageois tiennent assemblĂ©e, ils discutent sur la cruautĂ©, la mĂ©chancetĂ© et la duplicitĂ© des Blancs. Bien informĂ©s des problèmes occidentaux, ils abordent la guerre qui oppose les français aux allemands.
âś…Chapitre 6 : La fĂŞte bat son plein avec l’arrivĂ©e des Ga’nzas, les li’nghas, balafons, kou’ndĂ©s… Une communion entre jeunes et vieux, hommes et femmes se fait dans la danse. Tout juste après les Ă©preuves de circoncision et d’excision, et pendant que les li’nghas et kou’ndĂ©s tonnaient, le commandant arriva Ă  l’improviste mettant ainsi fin Ă  la cĂ©rĂ©monie. En ce moment, le père de Batouala est retrouvĂ© mort.
âś…Chapitre 7 : Les funĂ©railles du père de Batouala se dĂ©roulent comme prĂ©vu par la tradition. Le cadavre devait ĂŞtre exposĂ© durant huit jours, parfois mĂŞme plus. Batouala pendant ce temps ruminait une vengeance contre son ami Bissibi’ngui. L’enterrement de dĂ©funt est fait ainsi que le veut la coutume.
âś…Chapitre 8 : Yassigui’ndja se rend au rendez-vous de Bissibi’ngui. Elle lui fait savoir qu’elle a ses menstrues, et demande la protection de celui-ci, car on l’accuse d’avoir causĂ© la mort de son beau-père. Elle lui exprime son amour et lui propose de fuir vers la capitale Bangui.
âś…Chapitre 9 : La nuit arrive et Bissibi’ngui va Ă  la chasse sur l’invitation de Batouala. Mais comprenant les indications de MacoudĂ©, il flaire le danger. « Comment tuerait-il Batouala ? » Telle est la question qui le hante.
âś…Chapitre 10 : Après une longue marche dans la nuit, Bissibi’ngui arrive enfin au campement de Batouala oĂą il trouve la mère de ce dernier et le petit chien Djouma. Batouala lui raconte le mythe de crĂ©ation du feu, celui d’Ipeu, la lune et de Lolo, le soleil. Cependant C’est pour faire allusion Ă  sa vengeance.
âś…Chapitre 11 : c’est une belle matinĂ©e de battue pour la chasse. Batouala raconte des lĂ©gendes sur la vie des lions et des panthères. Puis il fait le rĂ©cit d’un Blanc, Coquelin, qui, ayant tuĂ© un M’balas, meurt Ă  la suite des blessures qui lui cause l’animal.
âś…Chapitre 12 : Il y eut un feu de brousse qui ameute les animaux. C’est dans cette confusion de chasse que Bissibi’ngui en Ă©vitant la panthère qui bondissait sur lui put par la mĂŞme occasion Ă©viter in extremis la sagaie que lui destinait Batouala. La panthère que la sagaie manqua de transpercer se rua sur le lanceur Batouala et lui ouvrit le ventre.
âś…Chapitre 13 : c’est l’agonie de Batouala devant les yeux moqueurs de sa femme et de son rival. MalgrĂ© la science des sorciers noirs, Batouala ne put ĂŞtre sauvĂ©.
🎯Conclusion
Ce roman est complet. Il ne pouvait en ĂŞtre autrement, car il est Ă©crit par un administrateur colonial qui n’a pas peur de reprĂ©sailles de la part de son employeur blanc. Il est ainsi complet parce qu’il renferme au-delĂ  de l’intrigue autour de la vie banale d’un chef de village en pĂ©riode coloniale, l’histoire de tout un peuple face Ă  diffĂ©rentes situations causĂ©es par le colonisateur. La rĂ©ussite de Maran rĂ©side dans la façon de rendre vivant son rĂ©cit avec l’animation de la faune et de la flore qui participent dans le rythme de la vie des africains. Cette symbiose rĂ©ussie actualise le roman dans le dĂ©bat actuel de l’homme face Ă  son environnement. L’indispensable vie naturelle des noirs s’offre ici comme un exemple d’harmonie que la civilisation occidentale n’a pas fini de dĂ©truire, et avec une grande partie des coutumes africaines.