INDIVIDU ET SOCIÉTÉ

A- INDIVIDU, PERSONNE ET SOCIÉTÉ:

Un individu est un être organisé d’une maniérée autonome et qui constitue une unité distincte dans sa propre espèce. Donc un échantillon d’une espèce quelconque. Étymologiquement, le mot individu vient du mot latin ”INDIVIDIUM” qui signifie indivisible, c’est-à-dire le caractère physiologique indissociable. Il est l’être qui est isolé de la collectivité à cet égard. La Personne est un individu de l’Espèce humaine. C’est un être qui a une conscience claire de lui-même. Etre auquel est reconnu la capacité d’être sujet et droit. La Société est un groupe d’individus unifiés par un réseau de relations, des traditions, d’institutions et de normes communes. Selon ANDRÉ LALANDE, la société ”est un ensemble d’individus humains dont les rapports sont considérés en instruction et même le plus souvent garantie par l’existence de sanctions codifiées aux diffuses qui font sentir l’action et la contrainte de la collectivité”. Le problème est maintenant de savoir comment on passe de l’individu à la société.

B- DE LA NATURE À LA SOCIÉTÉ:

En ce qui concerne l’origine de la vie en société, les avis sont partagés. En effet, chez ARISTOTE, la société est antérieur et préexiste à l’individu. Pour lui, celle-ce est naturelle. D’ailleur, la cellule de base de la société c’est la famille. Sa finalité est de devenir une communauté humaine. Dans son extension, elle donne naissance à un village et lorsqu’elle atteint son développement complet, elle devient une cité. Selon ARISTOTE : ”l’homme est un animal politique”. Il ne peut vivre que dans et par la société. Il est prédisposé à entrer en communication avec les autres. De tous les animaux, il est le seul qui parle. Du moment où la nature ne fait rien en vain (inutile), c’est comme si celle-ci l’avait préparé à la vie en groupe. Il est à la société ce que les partis du corps sont au tout. De la même manière qu’un organe ne peut vivre sans le corps, sans périr de même un homme ne peut vivre en dehors de la société. ARISTOTE écrit à ce propos : ” […] l’homme qui est dans l’incapacité d’être membre d’une communauté ,où qu’il n’en éprouve nullement le besoin parce qu’il se suffit à lui-même, ne fait en rien parti d’une cité, et par conséquent est ou une brute ou un Dieu”. Donc, pour cet auteur, non seulement la société est naturelle mais elle préexiste à l’individu. Chez ROUSSEAU et HOBBES au contraire, l’origine de la société est une convention que les individus ont passé entre eux. Ils ont imaginé le moment du passage de l’ÉTAT DE NATURE à la VIE CIVILE après avoir défini la situation de l’homme avant la société. Chez ROUSSEAU, l’état de nature est un état d’abondance où l’homme est naturellement bon au départ. Il trouve dans la nature tout ce dont il a besoin pour vivre. Le lien étroit à celle-ci fait que le rapport à autrui est quasi-inexistant. Les hommes vivent en paix et n’ont qu’un seul souci : veiller à leur propre conservation. L’amour de soi, premier sentiment naturel, incite l’homme à n’avoir soin que de lui-même. A ce niveau de la réflexion, on pourrait se demander pourquoi les hommes ne se sont pas maintenu dans cet état de nature dans lequel ils jouissaient de toutes leur liberté. Le problème c’est qu’en un moment donné, la rareté survint dans la nature, y installant le manque. Les hommes allaient se retrouver dans une situation de compétition. Petit à petit, l’homme se dénature. De bon, il devient un animal dépravé. L’égalité naturelle devient une égalité devant la mort. Le droit naturel ou liberté naturelle illimitée fait que chaque homme allait représenter un obstacle pour chacun. Il règne alors une contradiction mortelle inhérente à l’état de nature qui devient un état de tension, de conflit potentiel. Parlant de l’état de nature, HOBBES considère que les relations entre les individus reposent sur le conflit : ” l’homme est un loup pour l’homme ”. Chacun voit l’autre comme un obstacle à éliminer pour satisfaire ses désirs. La seule loi qui prévaut est celle du plus fort. Dans ce cas précis, autrui, loin d’être le sujet de mon épanouissement devient celui dont on cherche la mort, l’anéantissement. L’état de nature est l’état de guerre où chacun craint chacun. Pour éviter une mort certaine, les hommes devaient renoncer à la liberté naturelle. Donc, chez les deux auteurs, la solution c’est le PACTE SOCIAL.

Le contrat social peut se définir comme un pacte conclu entre les hommes qui serait à l’origine de toute société. Celle-ci ne peut alors se former que sur la base du consentement et de l’accord naturel de tous les contractants sur les clauses (conditions) du contrat. C’est ce que ROUSSEAU et HOBBES ont tenté de faire voir en imaginant le passage de l’état de nature et l’état social. Toutefois, le contrat n’est pas énoncé dans les mêmes termes chez ces deux auteurs :

— pour ROUSSEAU, il s’agit d’un PACTE D’ASSOCIATION. L’homme cède une partie de sa liberté à une assemblée : la volonté générale. Il devient ainsi membre d’un corps social et, plus tard, un citoyen. Il ne perd pas sa liberté : il l’aliéné. Selon ROUSSEAU toujours, ”chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale. Et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout”.

— pour HOBBES, chacun renonce à la totalité de sa liberté naturelle et la place entre les mains d’un seul homme : le LÉVIATHAN. Se faisant, chacun accepte de ne plus être un obstacle pour chacun. La renonciation est mutuelle, ici aussi. HOBBES écrit : ”j’autorise cet homme ou cette assemblée, je lui abandonne mon droit de me gouverner moi-même, à cette condition que tu lui abandonne ton droit et que tu autorise toutes ses actions de la même manière”.

3– LES NORMES SOCIALES : Une fois le contrat conclu, personne ne peut se comporter comme il veut. Pour assurer la survie de la structure sociale ainsi créée, les hommes doivent respecter les normes établies et accepter la limitation des libertés individuelles illimitées et contradictoires. D’ailleurs, c’est dans la soumission à ces normes que se trouve la véritable liberté. Être libre ne signifie pas faire ce que l’on veut mais se conformer aux règles. Selon MONTESQUIEU, ” la liberté ne consiste pas à faire ce que l’on veut ; la liberté est le droit de faire ce que les lois permettent et si un citoyen pouvait faire ce qu’elle défende, il n’aurait plus de liberté et les autres auraient tout de même ce pouvoir.” La vie en société obéit à des exigences. Elle nécessite avant tout que l’individu, dans son comportement, se soumette aux normes sociales en vigueur. Les normes peuvent se définir comme L’ENSEMBLE DES RÈGLES, DES PRINCIPES, QUI SERVENT DE LIGNES DIRECTRICES À LA CONDUITE HUMAINE. Elles fixent les modèles de comportement auxquels chacun doit se conformer. A ce niveau, il convient de noter que même si les normes varient d’une société à une autre, elles ont la même finalité, c’est- à-dire de créer et maintenir un mode de vie en commun dans le cadre d’une organisation sociale. MONTESQUIEU écrit : ” j’ai d’abord examiné les hommes et j’ai vu que dans cette infini diversité des lois et des normes, il n’était pas uniquement conduit par leur fantaisie, mais par un esprit, une raison commune.” Cela explique la nécessité pour chacun d’avoir un respect scrupuleux des devoirs. Ce n’est que dans ces conditions que la paix, la concorde, l’entraide et le respect mutuel peuvent être instaurés. A partir du moment où la société est constituée, chacun doit savoir que la sauvegarde de la liberté et la protection de ces biens incombent à tous et reposent sur ce qu’ANDRÉ CRESSON appelle : ” le fétichisme du devoir”, autrement dit le respect scrupuleux des devoirs. Chaque contractant doit savoir que sa liberté a des bornes, elle se limite ou s’arrête là où commence celle des autres.

4– DÉVIANCE, MARGINALITÉ ET FOLIE : Toute déviance vis à vis de la norme, nous situe dans l’anormalité. Mais les formes de celle-ci peuvent varier. C’est ce qui nous conduit à faire la différence entre la déviance, la marginalité et la folie. — En général, DÉVIER signifie sortir de la voie tracée, s’écarter de la direction normale pour emprunter une autre voie. Dans la société, le DÉVIANT est celui dont le comportement s’écarte des normes établies. Il ne les transgresse pas seulement, il associe à sa révolte la proposition de nouvelles régles. C’est le cas du rebelle, du fugueur et du révolutionnaire. La déviance peut s’expliquer par des facteurs économiques, la plupart des déviances sont issues des zones défavorisées. — Être en MARGE d’une société, c’est être en dehors des normes établies soit volontairement soit involontairement. Parmi les marginaux, nous pouvons citer les immigrés non encore intégrés, les criminels, les clochards. On peut ajouter à la liste les prophètes, les héros, les philosophes, les surdoués. — Pour la société, le FOU est celui qui a perdu la raison. Il est le modèle du déraisonnable. En effet, la raison est la condition d’accès à l’intelligence de la norme. Le fou qui est supposé l’avoir s’en écarte inévitablement. Il ne peut inscrire son comportement dans le cadre des normes. Si l’on puni le déviant et le marginal, par contre on pardonne au fou parce qu’il n’est plus responsable de ses actes. Pourtant, même s’il est expulsé par ceux qui se considèrent comme normaux, il est celui qui consolide le système social, qui indique le sort réservé à ceux qui ne se conforment pas aux normes et qui rappellent que l’état normal est précaire. En définitive, nous vivons en société parce que nous ne pouvons pas nous suffire à nous même. Au sein de celle-ci, nous devenons des personnes conscientes de leur droit mais aussi de leur devoir et soucieuses de préserver la stabilité du groupe malgré notre tendance à l’individualisme.