NATURE ET CULTURE

Le terme ‘’nature’’ désigne les charmes paisibles de la campagne, la pureté de l’air, l’authenticité des choses, les quatre éléments, l’environnement, le milieu physique, ce que l’homme trouve sur place, le monde, l’univers, tout ce qui ne relève pas de l’activité transformatrice de l’homme. Elle peut aussi renvoyer à l’instinct, aux pulsions primitives, ce avec quoi l’on nait, l’hérédité psychobiologique, le patrimoine génétique, l’inné, tout ce qui est universel chez l’homme, tout ce qui se caractérise par la spontanéité.


La nature peut encore se définir comme ce que Dieu nous a donné, l’âme ou l’essence ou bien Dieu lui-même. La force qui régit souverainement l’univers.
   La culture quant à elle peut se comprendre d’abord comme l’action de cultiver, la mise en valeur de la nature (ici le monde physique). Elle peut aussi se définir comme la civilisation, la formation du citoyen, l’éducation, l’acquis, l’ensemble des acquisitions d’un individu hors d’une société, tout ce qui dans le comportement parvient d’un apport extérieur. C’est aussi le langage articulé, le relatif, le particulier, un ensemble complexe de croyances, de coutumes, des stipulations et d’institutions que l’on désigne sous le nom de prohibition de l’inceste.
Existe-t-il une nature humaine ?
Cette clarification nous mène à nous poser la question de l’existence d’une nature humaine.
-sur le plan scientifique, l’homme est un ensemble de caractéristique psychobiologique. En effet, il est corps et raison. A la naissance, l’homme apparait sous une forme particulière quel que soient sa couleur et son appartenance sociale. Il est constitué d’organes, de membres, d’instincts, de pulsions et de cerveau. Celui-ci se présente comme un réceptacle et est ce qui permet à l’homme de recevoir des données extérieures, d’être formé. L’ensemble de ces dispositions naturels que l’homme apporte à la naissance est ce qu’on nomme HEREDITE et que les psychologues appellent l’équipement congénital ou l’appareil biologique.
Il s’agit d’un fond commun à tout les hommes qui restent immuable, c’est-à-dire ce qui ne change pas. C’est ce que LEVI-STRAUSS appelle l’«universel», ce qui «relève de l’ordre de la nature» et qui «se caractérise par la spontanéité». C’est le noyau dur, immuable, que les biologistes tels qu’ALEXIS CARREL et GOBBINEAU désignent sous l’appellation de nature humaine. 
-sur le plan philosophique, il existe par contre une vive polémique entre les IDEALISTES et les EXISTENTIALISTES à propos de l’existence de la nature humaine. Déjà, chez PLATON, on retrouve une conception de l’homme qui fait abstraction de son apparence pour ne porter attention qu’à sa dimension spirituelle. L’homme, nous dit PLATON, est son essence, c’est-à-dire son âme. Dans LE PHEDON, il l’a considère comme l’être véritable d’autan plus que a réalité concrète est changeante. La nature humaine serait donc cet être immuable qui est chez tout homme et qui fait qu’il soit appelé homme. Ce qui reste le même chez chacun et qui ne change pas. C’est l’idée elle-même d’homme tel que nous la présente l’anthropologie philosophique. Celle à partir de laquelle la qualité est définie. Elle est non seulement immuable mais immortelle contrairement au corps.
Pour ce qui est des EXISTENTIALISTES, ils rejettent l’idée d’une nature humaine. En effet, pour eux, il n’existe ni essence ni nature humaine qui serait donnée d’avance. Pour JEAN PAUL SARTRE : «l’homme n’est rien d’autre que son projet, il n’existe que dans la mesure où il se réalise, il n’est donc rien d’autre que l’ensemble de ses actes, rien d’autres que sa vie». Ce qu’il faut retenir par là, c’est que, ce que l’homme est, dépend de ses choix individuels, de son engagement. Il est à lui-même son propre projet. Il n’a donc pas de destin préétabli qui prévoit ce qu’il sera ou qui dit d’avance qui il sera. S’il pourrait se définir, il se définirait selon sa liberté. «En effet, tout est permis si Dieu n’existe pas, et par conséquent l’homme est délaissé, parce qu’il ne trouve ni en lui, ni hors de lui une possibilité de s’accrocher». Son devenir est placé sous sa volonté, sous sa responsabilité. Son avenir est une page blanche, une case vide, selon LUCIEN MALSON. Il n’est donc ni connaissable à l’avance ni définissable. LUC FERRY et ANDRE COMTE SPONVILLE le considèrent comme un être indéterminé, libre de l’influence de la nature. C’est un «être d’antinature (…), son essence est de ne pas avoir d’essence».  A sa naissance, il est un ensemble de possibilité, de virtualité aussi légère qu’une transparente vapeur d’eau. L’homme est donc en devenir et, selon LUCIEN MALSON, «il n’est pas encore réalisé, il est en réalisation».
Le fait culturel :
Comme précédemment énoncé, la culture est tout ce que l’homme ajoute à la nature, qu’il s’agisse du milieu physique ou de la nature propre de l’homme.
Dans le cas premier, la culture est l’action transformatrice du milieu naturel. Contrairement à l’animal qui est déterminé, l’homme ne peut se contenter de suivre, d’obéir aux lois de la nature. En effet, l’animal est agit, il ne fait que suivre un plan déjà ficelé par la nature. Il est comme programmé, il répète toujours les mêmes opérations. Il subit ainsi le déterminisme naturel. L’oiseau par exemple fera toujours son nid de la même manière, l’abeille fait à chaque fois la même ruche. Par contre, l’homme a su se mettre à l’écoute de la nature pour en comprendre des lois. La maitrise de celle-ci lui a permis de la transformer et de la soumettre à sa volonté. Ainsi, si l’animal subit le déterminisme naturel, la nature, l’homme agit sur elle, il le domine et s’en libère grâce à la raison.
Il invente des objets, des outils qui seront le prolongement de ses mains. Ces intermédiaires qu’il fabrique lui sont indispensables car à la naissance, l’homme est nu et désarmé. De plus, selon FRANCIS BACON : «la main et l’entendement abandonnés à lui-même n’ont qu’un pouvoir très limité ; ce sont les instruments et les autres genres de secours qui font presque tout, secours et instruments non moins nécessaires à l’esprit qu’à la main».
Par ailleurs, en même que l’homme agit sur le milieu extérieur, il «se nie lui-même, il s’éduque, il refuse par exemple de donner à la satisfaction de ses besoins animaux ce cours libre auquel l’animal n’apportait pas de réserve», comme le dit GEORGES BATAILLE. Ce second sens du mot culture est donc étroitement inhérent au premier où cette notion signifie Travail. Ici, en effet, la culture est ce qui humanise l’homme. Elle est en quel que sorte un rempart contre la barbarie, du moins elle devrait l’être. Selon MICHEL LERIS qui cite RALPH LINTON, la culture est un «ensemble organisé de comportements appris et résultats de comportements, dont les éléments composants sont partagés et transmis par les membres d’une société particulière». Elle diffère, de ce point de vue, des instruments et outils de la technique. Il s’agit de la religion, de la morale, de la science, de la littérature, de la philosophie, de l’art, en un mot de tout ce qui entre dans l’éducation et qui est transmit par les membres d’une société. A ce niveau, il convient de noter qu’il existe une multiplicité de cultures qui varient d’une société à l’autre et d’une époque à l’autre. Donc les cultures sont différentes. En effet, les modes de vie, les coutumes, les pratiques culturelles et cultuelles, les normes de référence, les institutions sont spécifiques à chaque groupe social. On parle alors de relativité culturelle ou de multiculturalisme.  C’est ainsi que si certains peuples sont monothéistes, d’autres sont polythéistes. Par ailleurs, nous n’avons pas les mêmes modes vestimentaires et alimentaires. Du point de vue des traditions, nous notons aussi des différences. Ainsi, au Sénégal par exemple, ce sont les hommes qui donnent la dit contrairement en Inde où c’est la famille de la mariée qui s’en acquitte. Enfin, le mariage homosexuel est autorisé en Hollande alors qu’il est pratiquement interdit dans tous les pays d’Afrique. Cela a pour conséquence de créer des barrières entre les peuples et ainsi que la montée du racisme et de la xénophobie.
Aujourd’hui, il est possible de parler également de métissage culturel ou de dialogue entre les cultures. Il y a alors un rapprochement entre les peuples. Ceci se traduit à travers le phénomène de la mondialisation. Ainsi, le monde est devenu conne un village planétaire. Le développement des technologies de l’information et de la communication a facilité l’accès à l’information, la libre échange, la circulation des personnes et des biens. Nous assistons à une délocalisation de certaines industries. Cela permet le transfert des compétences et de technologies.
Cependant, l’universalité culturelle cache de graves problèmes. En effet, elle engendre chez certains un déracinement, une acculturation. Ainsi, certains renient leur culture pour épouser celle d’autres. Certaines cultures sont menacées de disparition. Il s’en suit dégradation des valeurs et une perte de repère sans précédents, comme le dit SERGES LATOUCHE. Les pays techniquement et scientifiquement avancés imposent leurs cultures aux pays les moins avancés. Cette influence extérieure est à l’origine de la dégradation des mœurs, du conflit de générations. La perversion gagne du terrain de même que le proxénétisme, la prostitution clandestin, la cybercriminalité, la pornographie. Pour faire face à de tels fléaux, certains comme SENGHOR ont proposé «l’enracinement et l’ouverture», d’autre comme CESAIRE «le retour aux sources». 

Le travail :

Le travail peut être défini comme une activité de production d’une réalité utile. C’est aussi un exercice professionnel réglementé.
-Le travail comme libérateur :
Si l’on se place du point de vue de la religion, le travail est une source de réalisation, d’humanisation. Dans l’éthique protestante, l’homme est considère comme l’être le plus parfait de la création : il est fait a l’image de Dieu. Or, pour mériter ce statut ; il doit poursuivre et approfondir l’œuvre créatrice de Dieu. Il devra faire fructifier les ressources en germe dans la nature. On comprend d’ailleurs pourquoi chez les Mourides du Sénégal,  la l’oisiveté est condamnée. Max Weber l’a compare d’ailleurs à une contemplation inactive qui se fait au détriment du travail producteur.
Par ailleurs, nous avons l’habitude d’appeler les gens par leur métier, par leur caste. Chez les «Pular» du Fouta du Sénégal, la distinction est faite entre les hommes en fonction de leur travail. De ce point de vue, ce dernier est un facteur d’intégration socioprofessionnel. De plus, non seulement le travail insert l’homme parmi ses semblables mais également il lui confère une dignité par rapport aux animaux. Il est également un moyen d’échapper à l’imminence de la mort. Pour MICHEL FAUCAULT, «c’est parce que les ressources naturelles sont insuffisantes que les hommes travaillent». Donc le travail est une activité par laquelle l’homme se libère de la nature et diffère la mort, autrement dit retarder la mort. Ceci, d’ailleurs, place le travail au centre de l’économie. Il note : «à chaque instant de son histoire, l’humanité ne travaille que sous la menace de la mort : toute population, si elle ne trouve pas de ressources, est vouée à s’éteindre», sauf que l’homme, comme nous l’avons évoqué, ne se maintient en vie en suivant la nature. Il l’a façonne et en tire des outils, des outils qu’il fabrique et qui sont une manifestation de son esprit. HEGEL écrit dans ce sens : «un instrument inventé par l’homme est plus haut qu’une chose de la nature ; car il est une production de l’esprit». L’homme est donc travailleur et technicien.
Dans la dialectique du maitre et de l’esclave, celui devient le maitre du maitre en travaillant et en soumettant le monde extérieur à sa propre force. Par le travail, l’homme humanise le monde. Dans la conception hégélienne, le travail opère une conversion en produisant un renversement dialectique entre le maitre qui vit dans la l’oisiveté et l’esclave travailleur. Ce dernier se libère de la nature mais aussi de la domination du maitre qui devient l’esclave de l’esclave.
Pourtant, toutes ces considérations ne devraient pas cacher les critiques faites du travail.
-Le travail comme facteur d’aliénation :
Même s’il est facteur d’intégration, le travail n’en est pas moins source d’inégalité socioprofessionnelle et économique.
-Sur le plan social, la différence des métiers a été à l’origine des castes. Et, au lieu de se traduire par une intégration, le travail est à l’origine du clivage, de la répartition de la société en classes, de la marginalisation des chômeurs. Dans nos sociétés modernes, seul les riches et ceux dont le travail est subtilement rémunéré sont respectes. Cela a pour conséquence de nombreux maux dont l’exclusion sociale, la stigmatisation et la montée en puissance de la violence.
-Sur le plan professionnel, cela se traduit par des grèves, des luttes syndicales pour la réclamation de meilleures conditions de vie et de travail : grèves des médecins, des professeurs par exemple.
-Sur le plan économique, on note un regroupement des Etats en blocs idéologiques, une répartition du monde en pays développés, émergents, sous-développés ou pauvres.
-Sue le plan philosophique, le travail a été critiqué par des acteurs  comme PLATON, MARCUSE et même KARL MARX.
Dans la Grèce antique, le travail manuel était jugé servile. Il était réservé aux esclaves. Les hommes libres se consacraient à la méditation et à la politique. La société méprisée les artisans et les hommes qui s’adonnaient à ce que NITZSCHE appellera plutard : «les durs labeurs».
D’un autre côté, nous remarquons qu’à notre époque, les hommes aspirent plus aux jeux, à la distraction qu’au travail. D’ailleurs, MARCUSE prône le retour à la société des loisirs. Il pense, en effet, que les hommes ont produit suffisamment de biens et de richesses et qu’ils n’ont plus besoins de travailler. Enfin, dans sa critique du capitalisme, KARL MARX voit le travail comme un moyen d’exploitation de l’homme par l’homme ou de domination du prolétariat par la bourgeoisie. Ce qui d’ailleurs a conduit à la lutte ouvrière pour le respect des droits des travailleurs et l’amélioration de leurs conditions de vie.